Gérance, remplacement et assistanat-collaboration

Un cabinet secondaire, ou non, peut-il être l’objet d’un contrat de gérance ?
La gérance, ou location-gérance, permet au locataire-gérant d’exploiter librement le cabinet à ses risques et périls moyennant le paiement d’une redevance qui peut être fixe ou proportionnelle au chiffre d’affaires ou au bénéfice.
L’article R 4321-132 n’autorise la gérance qu’en cas de décès ou d’incapacité définitive d’exercer et pour une durée maximale d’un an.
La gérance doit être distinguée de l’exploitation du cabinet par un collaborateur ou un salarié. En l’état actuel du code rien n’interdit de faire tenir un cabinet par un ou plusieurs assistants, salariés sans y travailler soi-même. Seul le nombre de cabinets peut être limité.
(Bulletin officiel de l’Ordre n° 8 / Avril 2009)

Il y a lieu de distinguer remplaçant, assistant, gérant. Seule la gérance est interdite sauf cas particulier prévu à l’article R. 4321-132.
L’article R. 4321-107 précise que le remplacement est temporaire. Le Conseil départemental peut accepter exceptionnellement que le remplacé ne cesse pas toute activité de soin pendant le remplacement.
C’est le remplaçant qui encaisse les honoraires pour les actes qu’il dispense.
L’assistant libéral exerce en collaboration avec le titulaire. Dans le cas où ce dernier n’exercerait pas, nous serions dans une situation de gérance donc interdite sauf dérogation prévue par l’article R. 4321-132.
La situation se complique lorsqu’il existe plusieurs cabinets et que le titulaire exerce exclusivement dans le cabinet principal. On ne peut pas considérer qu’il y a véritable gérance du ou des cabinets secondaires par les collaborateurs libéraux ou salariés qui y exercent car le propriétaire en assure la gestion tout en continuant à exercer. On peut certes le regretter mais les modifications du code qui nous ont été imposées ne nous permettent pas de s’opposer à ce type de fonctionnement.
(Bulletin officiel de l’Ordre n° 9 / Juin 2009)

Certains titulaires de cabinet(s) font traiter les patients d’établissements privés de santé (cliniques, maisons de retraite, ehpad etc.) par de jeunes professionnels avec lesquels ils signent des contrats de collaboration. Le fait que ces MK titulaires n’interviennent jamais en tant que soignants dans ces établissements avec lesquels ils ont conclu des conventions, permet-il d’assimiler ce type de fonctionnement à de la « gérance » ?
En l’état actuel du code de déontologie, la réponse ne peut qu’être négative. En revanche nous considérons que ces établissements, lorsque l’activité du collaborateur leur est exclusivement consacrée, doivent être assimilés à des cabinets secondaires avec les conséquences déterminées par l’article R 4321-129. Il appartient donc aux CDO de rechercher ces types d’exercice et de faire respecter notre code de déontologie.
Déontologiquement, il est inadmissible qu’à la faveur d’une convention signée avec une société possédant de nombreux établissements en France, on puisse faire exercer dans ceux-ci des collaborateurs ne bénéficiant pas des avantages habituellement procurés par le titulaire d’un cabinet à son collaborateur.

Est-il abusif d’évoquer la notion juridique « d’enrichissement sans cause » ?
Notre analyse est transposable lorsqu’un titulaire possède un cabinet secondaire dans lequel il n’exerce jamais. C’est l’opposition du Conseil de la concurrence et du ministère qui nous a empêchés de réglementer ces situations. Seul, l’article R 4321-129 peut être utilisé.

Peut-on céder son cabinet et y devenir assistant-collaborateur ?
Rien ne s’y oppose.

La durée des remplacements est-elle limitée et variable en fonction des motifs ?
L’article R 4321-107 précise que le remplacement est temporaire. L’appréciation doit se faire au cas par cas, pour éviter une pseudo gérance non justifiée (R. 4321-132). La décision initiale appartient au CDO. Au fil des années et des litiges, s’instaurera une jurisprudence.
(Bulletin officiel de l’Ordre n° 10 / Octobre 2009)

Suite à un décès, la gérance est autorisée. Il appartient aux ayants droit de choisir le gérant. Le CDO a le devoir moral, confraternel et humain d’apporter à ceux-ci toute l’aide nécessaire.
(Bulletin officiel de l’Ordre n° 12 / Mars 2010)

En cas de gérance (article R. 4321-132 du code de la santé publique) quel est le statut du masseur-kinésithérapeute remplaçant ?
Dans cette situation exceptionnelle qui ne peut excéder douze mois, le masseur-kinésithérapeute remplaçant exerce à titre libéral et doit demander à la CPAM des feuilles de soins à son nom. Il semblerait que certaines CPAM
entendent limiter l’exercice aux seuls soins en cours. Cette position n’a aucune justification, le code de déontologie est très clair. Bien entendu pour éviter tout conflit avec les ayants droit, un contrat doit être signé entre les parties et adressé au conseil départemental de l’Ordre.
(Bulletin officiel de l’Ordre n° 15 / Septembre 2010)

En longue maladie depuis plusieurs années peut-on avoir recours à des remplaçants ?
L’article R. 4321-107 du code de la santé publique précise que le masseur-kinésithérapeute ne peut se faire remplacer que temporairement. Cet adverbe implique certes une durée limitée, mais il est suffisamment imprécis – son contraire serait définitif – qu’il laisse aux Conseils départementaux de l’Ordre une marge d’appréciation confraternelle. Ainsi une longue et grave maladie ne signifiant pas une impossibilité définitive d’exercer, peut justifier un remplacement prolongé.
Dans le cas d’une invalidité rendant impossible définitivement l’exercice de la profession, c’est l’article R 4321-132 du code de la santé publique qui s’applique. Il prévoit la possibilité d’avoir recours à un gérant pour une durée de six mois, renouvelable une fois.
(Bulletin officiel de l’Ordre n° 16 / Novembre 2010)

Nous rappelons que se faire remplacer c’est conséquemment cesser d’exercer, sauf accord préalable du Conseil départemental qui peut prendre en considération des circonstances exceptionnelles. De plus le remplacement (article R4321-107 du CSP) doit être temporaire. Nous avons déjà formulé un avis sur l’interprétation du caractère temporaire que peut en faire le Conseil départemental.
Rien ne permet de s’opposer à un remplacement régulier, tel ou tel jour ou par demi-journée.
Si ce type de remplacement n’est pas limité en durée, et est donc illimité, doit-on s’y opposer ?
Serait-il utile et efficace de fixer un terme (un an, deux ans…) sachant que ce contrat pourra être renouvelé à son terme ?
En résumé le Conseil départemental a un droit d’appréciation en fonction des motifs du remplacement. En cas de refus ou de contestation, la voie du recours au Conseil national serait ouverte.

Un masseur-kinésithérapeute inscrit à un tableau métropolitain peut-il se faire remplacer dans son cabinet et concomitamment effectuer un remplacement dans un DOM ou TOM ?
La réponse est clairement négative. Remplacement signifie non exercice par le remplacé, sauf dérogation accordée exceptionnellement par le Conseil départemental (article R 4321-107 CSP ).

Un masseur-kinésithérapeute retraité, non inscrit à l’ordre, peut-il gérer un cabinet avec des salariés pour effectuer les soins ?
Des assouplissements aux règles de cumul emploi/retraite ont été prévus par la loi n° 2008- 1330 du 17 décembre 2008. Compte tenu de la complexité de ces mesures, il est préférable que chaque personne expose sa situation individuelle à l’organisme de retraite auquel il est rattaché. En tout état de cause, cette activité ne pourra reprendre que sous la réserve d’être inscrit au tableau de l’ordre de son département.
Si le Conseil de la concurrence, suivi par le ministère, avait entériné les propositions du Conseil national ce cas de figure ne pourrait pas se présenter.
(Bulletin officiel de l’Ordre n° 17 / Mars 2011)

Un masseur-kinésithérapeute libéral employant des masseurs-kinésithérapeutes salariés et désirant ouvrir un cabinet secondaire doit-il être présent sur le cabinet ou un salarié peut-il exercer seul ?
Rien, déontologiquement, ne permet de s’opposer à une telle situation que l’on peut regretter.
Peut-on rappeler que le projet de code élaboré par le Conseil national aurait permis de juguler ce phénomène ? L’Autorité de la Concurrence (anciennement Conseil de la concurrence) suivie par le ministère chargé de la santé et par le Conseil d’État ne l’a pas voulu.
(Bulletin officiel de l’Ordre n° 18 / Avril 2011)

Nombre de collaborateurs.
Le projet de code de déontologie présenté par le Conseil national, après consultation des Conseils départementaux, prévoyait une limitation du nombre des collaborateurs, assistants et salariés.
Mais cette proposition a été repoussée par le Conseil de la concurrence (aujourd’hui Autorité de la concurrence) suivi par le Ministère chargé de la santé et le Conseil d’Etat. Il en découle qu’aucun texte ne permet une telle limitation. Une décision du Conseil d’Etat (11 octobre 2010, n° 330296) a été évoquée. Cette décision interprétative concerne une SEL de médecins et limite le nombre de collaborateurs à un seul.
Certes la Haute juridiction invoque, à l’appui de sa décision, un certain nombre de principes déontologiques que nous retrouvons dans notre code, pour conclure que la réglementation de la profession de médecins, ainsi d’ailleurs que celle des autres professions médicales, justifie légalement de limiter le nombre de collaborateurs libéraux ; conséquemment le premier alinéa de l’article R 4127-87 du code de la santé publique doit donc, dans ce contexte, être interprété comme signifiant qu’il n’est loisible à tout médecin que de conclure un seul contrat de collaborateur libéral avec un confrère.
La question se pose de savoir si cette décision peut être extrapolée à notre profession. Trois remarques doivent être faites :
– en l’espèce, il s’agit de l’application aux professions médicales de la loi du 2 août 2005, dite loi Dutreil, créant le statut de collaborateur libéral.
– le Conseil d’Etat ne fait référence qu’aux professions médicales, nullement aux professions auxiliaires.
– enfin le premier alinéa de l’article R.4127-87 du code de la santé publique (code de déontologie des médecins) conforte la position du Conseil d’Etat et permet une interprétation restrictive limitant l’autorisation à un seul collaborateur libéral. Le contexte juridique est donc différent.
Néanmoins « Le médecin peut s’attacher le concours d’un médecin collaborateur libéral, dans les conditions prévues par l’article 18 de la loi n° 2005-882 du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises. Chacun d’entre eux exerce son activité en toute indépendance, sans lien de subordination, et dans le respect des règles de la profession, notamment le libre choix du médecin par les patients et l’interdiction du compérage », il n’est pas interdit de penser que les mêmes principes déontologiques s’imposant aux masseurs-kinésithérapeutes, le Conseil d’Etat puisse adopter la même position, à savoir que « la réglementation justifie légalement de limiter le nombre de collaborateurs libéraux », voire d’assistants et d’interdire le salariat entre confrères.
Mais il s’agit de conjectures. A ce jour, pour être dans la conformité, nous devons respecter les dispositions du code de déontologie sus évoquées qui constituent le droit en vigueur.
(Bulletin officiel de l’Ordre n° 21 / Décembre 2011)

Le commodat est-il possible ?
Le code civil définit le commodat ou prêt à usage comme le prêt d’une chose dont on peut user sans la détruire. Il s’agit donc d’un contrat par lequel l’une des parties livre une chose à l’autre pour s’en servir, à la charge par le preneur de la rendre après s’en être servi (article 1875 du code civil). Ce prêt est essentiellement gratuit (article 1876 du code civil).
En clair peut-on prêter son cabinet à un confrère ou une SCP ou une SEL ?
Concernant les locaux et matériels nous n’avons pas d’objections. Mais en réalité il sera impossible de dissocier la clientèle qui restera attachée à ce cabinet.
Nous posons deux conditions expresses et irréfragables : la gratuité (essence même du commodat) et la limitation dans le temps à un an pour ne pas autoriser une pseudo-gérance prévue à l’article R 4321-132.
(Bulletin officiel de l’Ordre n° 22 / Mars 2012)

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