Concurrence

L’article R. 4321-130 institue une interdiction d’entrer en concurrence directe après un remplacement supérieur à trois mois pendant une période de deux ans.
Cette interdiction pourra être précisée dans le contrat de remplacement.
Une clause similaire est généralement prévue dans des contrats d’association.
En l’absence de précision et en cas de conflit, les chambres disciplinaires pourront déterminer la réalité de la concurrence directe. Le critère de la distance sera apprécié en fonction des lieux : il ne peut pas être le même dans une zone urbanisée et dans une zone rurale.
Peut-on accuser un collaborateur qui s’installe hors du périmètre déterminé par la clause de non-concurrence, de tentative de détournement de clientèle s’il communique sa nouvelle adresse aux patients ?
La réponse est négative s’il s’agit des patients qu’il traite habituellement.
Il en sera de même dans le cas d’un patient soigné par le titulaire qui voudrait exercer son libre choix.
Le praticien partant, s’il est libéral, pourra préciser sa nouvelle adresse sur son ancienne plaque pendant les six mois suivants son départ.
(Bulletin officiel de l’Ordre n° 9 / Juin 2009)

Un collaborateur qui s’installe hors du périmètre déterminé par la clause de non-concurrence peut-il, sans être accusé de détournement de clientèle, informer les patients de sa nouvelle adresse ?
Ce praticien a parfaitement le droit d’informer les patients qu’il traite, voire les patients qui veulent exercer leur libre choix.
En revanche informer par courrier tous les patients qu’il a soignés pourrait être assimilé à une tentative de détournement. Mais il peut préciser sur sa plaque sa nouvelle adresse pendant six mois après son départ et faire paraître une annonce par voie de presse.

Un masseur-kinésithérapeute remplace plusieurs fois les mêmes confrères au cours d’années successives, est-il soumis au respect de l’article R. 4321-130 du code de la santé publique ?
Cet article soumet le remplaçant à une clause de non-concurrence pendant deux ans, au- delà de trois mois de remplacement, consécutifs ou non. Considérant que des remplacements épisodiques au cours de plusieurs années ne peuvent pas générer un risque de concurrence déloyale et réelle, nous estimons que le « compteur » doit être remis à zéro tous les deux ans.
L’application de cet article R 4321-130 du code de la santé publique pose un certain nombre de problèmes. Il impose une règle déontologique : ne pas faire de concurrence déloyale pendant deux ans lorsque le remplacement
a été de trois mois consécutifs ou non.
Des contrats de remplacement prévoient une clause de non-concurrence, même en cas de remplacement d’une durée inférieure à 3 mois (semaine, quinzaine). Cette disposition n’est pas conforme au code de déontologie mais le code civil (article 1134) prévoit que « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites….. ».
Doit-on privilégier la liberté contractuelle ?
En l’absence de jurisprudence, nous admettons qu’il en soit ainsi. Mais, en cas de procès, nous attirons l’attention sur le fait que les magistrats peuvent souverainement décider que la clause de non-concurrence est disproportionnée que ce soit en durée ou que ce soit en périmètre.
Qu’en est-il en cas de clause de durée supérieure à deux ans ?
Le problème est juridiquement identique. Nous pouvons opter pour la liberté contractuelle, sachant qu’un tribunal pourrait prendre une position contraire en s’appuyant sur l’article R 4321-130 du code de la santé publique.
Dans le cas de figure où la durée d’interdiction serait inférieure à deux ans, nous considérons que la liberté contractuelle doit prévaloir, d’autant plus que l’article concerné précise cette éventualité a posteriori, en cas d’accord entre les parties.
Nous suggérons aux CDO de relever les contradictions entre les contrats et le code, d’en informer les parties signataires et de mentionner le caractère aléatoire d’une éventuelle décision judiciaire.
(Bulletin officiel de l’Ordre n° 12 / Mars 2010)

Un MK peut-il empêcher son ex-associé d’informer les patients de sa nouvelle adresse lors de son départ ?
Déontologiquement le masseur-kinésithérapeute qui quitte un cabinet a le droit d’informer ses patients de sa nouvelle adresse, ne serait-ce que pour assurer la continuité des soins.
Selon les usages, cette information peut aussi figurer sur la plaque professionnelle existante pendant six mois après le départ.
Une annonce par voie de presse peut être faite conformément à l’article R 3121-126 du code de la santé publique.
(Bulletin officiel de l’Ordre n° 13 / Mai 2010)

Rien n’interdit à un masseur-kinésithérapeute collaborateur à temps partiel par définition, d’exercer concomitamment dans un cabinet personnel qu’il voudrait créer, sous réserve que le contrat de collaboration (clause de
non-concurrence) le permette.

Proximité entre masseurskinésithérapeutes (installation dans un même immeuble).
L’article R. 4321-133 du code de la santé publique interdit l’installation dans un immeuble où exerce déjà un confrère ou consoeur sans l’accord de ce(tte) dernier(e) ou l’autorisation du Conseil départemental. Cet article précise, conformément à la jurisprudence abondante du Conseil d’Etat, qu’un refus ne peut s’appuyer que sur un risque de confusion pour le public. Ce risque de confusion peut naître des noms ou des lieux.
S’agissant du nom : par exemple, nous pourrions penser qu’il serait difficile de distinguer « Dupont » de « Dupond ».
S’agissant des locaux : il ressort de la jurisprudence du Conseil d’Etat relative aux médecins qu’un médecin de même discipline pouvait s’installer au 8e étage d’un immeuble malgré la présence d’un confrère au rez-de-chaussée. Un médecin, ex-associé, a été autorisé à transférer son cabinet au 4e étage, l’ancien associé demeurant au 2e étage. Par ailleurs, des locaux mitoyens qui n’ont pas d’entrée commune doivent être considérés comme
distincts. Dans un arrêt du 7 avril 1995, le Conseil d’Etat a autorisé une installation dans un immeuble distinct, séparé, ayant une entrée propre quoique appartenant à la même résidence et ayant la même adresse.
Il appartient à chaque Conseil d’apprécier les circonstances particulières, en s’inspirant de la jurisprudence.

Quelles peuvent être la distance et la durée dans une clause de non-concurrence ?
Nous avons déjà pris position, en l’absence de jurisprudence concernant la profession (en cas de conflit entre le contrat et le code de déontologie) pour le principe de la liberté contractuelle. Cependant, en cas de procédure, le magistrat apprécierait souverainement la réalité du risque de concurrence et pourrait donc annuler ou réviser la clause, si celle-ci lui paraissait excessive.
(Bulletin officiel de l’Ordre n° 14 / Juillet 2010)

A partir de combien de temps un masseur-kinésithérapeute peut-il prétendre avoir développé une clientèle personnelle ?
Il est extrêmement délicat de répondre à ce genre de question qui dépasse le cadre déontologique. Essayons de clarifier les choses.
La valeur d’une patientèle dépend de la loi de l’offre et de la demande. Pour l’estimer de nombreux critères sont à prendre en compte. C’est après une étude approfondie qu’une fourchette pourra être proposée. Concernant l’assistant, il n’y a pas de constitution de clientèle personnelle même si dans les faits, après plusieurs années d’exercice, on peut penser que des patients viennent au cabinet uniquement pour l’assistant.
Concernant la collaboration libérale (loi dite « Dutreil », août 2005), la problématique est différente puisque la loi précise que le collaborateur libéral peut développer sa patientèle personnelle et que le titulaire du cabinet doit faciliter ce développement. Les exemples de clauses diffusés par le Conseil national de l’Ordre prévoient que le collaborateur libéral et le titulaire procèdent tous les six mois au recensement de leur clientèle respective sur la base des critères qu’ils ont préalablement et mutuellement arrêtés. Ce sont donc les clauses du contrat qui doivent régler à l’avance ce problème épineux.
Il est loisible, mais non obligatoire, d’insérer dans un contrat une clause de non-concurrence. Il faut fixer une distance et une durée raisonnable pour ne pas risquer, en cas de procédure, une remise en cause par le juge. Dans le cadre du contrat de collaboration libérale, les conditions de cette clause sont librement débattues ; elles doivent être bien précisées, en particulier quant au rachat ou non de la clientèle par le titulaire.
Mais l’absence de jurisprudence en ce domaine et les positions non identiques des Ordres imposent la plus grande prudence et une certaine circonspection. Il ne faut jamais oublier que le juge a toujours, au vu de la réalité des conditions d’exercice, la possibilité de requalifier un contrat d’assistanat ou de collaboration libérale en contrat de travail avec toutes les conséquences qui en découlent.

En l’absence de jurisprudence, il est inexact, à tout le moins prématuré, de dire que la loi Dutreil-Jacob a supprimé le statut d’assistant-collaborateur. Cette loi a créé un statut de collaborateur-libéral. Contrairement à ce qui a pu être écrit, il n’est pas avéré que cette loi est d’ordre public, donc non-interprétable par les magistrats et qu’elle ait enterré l’assistanat. Seule la jurisprudence en décidera. Le Conseil national de l’Ordre s’en tient donc prudemment à la cohabitation des deux statuts.
La différence essentielle entre les deux concerne la patientèle. Dans le cadre d’un assistanat (pour éviter toute confusion il vaudrait mieux supprimer le terme collaboration) la clientèle est celle du cabinet, donc du ou des titulaires du cabinet. Dans le cadre de la collaboration libérale, le collaborateur-libéral se constitue une patientèle personnelle, la loi impose même au titulaire du cabinet de faciliter la constitution de cette clientèle. Il est évident que ceci peut générer des problèmes dont beaucoup n’ont pas mesuré les conséquences.
On ne peut que conseiller la plus grande prudence dans la rédaction de ces contrats. Le recours à un homme de loi est préférable au « bidouillage » trop fréquent en matière de contrats.
(Bulletin officiel de l’Ordre n° 16 / Novembre 2010)

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